Don Quichotte, de Miguel de Cervantès

Publié le 19 Avril 2011

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Au Musée d'Orsay, dans la salle consacrée à Daumier - où l'on trouve des petites statuettes reprenant ses caricatures -, un tableau représentant Don Quichotte accompagné de Sancho Panza près d'une mule morte me faisait dire avec une pointe de regret que je ne connaissais que ce que tout le monde sait de Don Quichotte, à savoir que c'est un livre dont le héros se bat contre des moulins.

 

Au terme de la lecture des 1400 pages du roman (très bonne traduction de Jean-Raymond Fanlo au Livre de poche, qui rend le texte de 1615 incroyablement proche), j'en sais maintenant un peu plus ! Et je ne m'attendais pas à un texte si drôle, au moins dans sa première partie, et si "moderne". Je comprends mieux pourquoi c'est un classique.

 

De quoi est-il question ? Don Quichotte est un modeste hidalgo (un noble espagnol) qui, passionné de récits de chevalerie, ne perçoit pas leur caractère fictionnel. En soi un problème, mais pas très conséquent. Mais Don Quichotte est persuadé d'être lui-même un chevalier errant, promis à une Dulcinée du Toboso qu'il a inventé en pensant à une paysanne de son village. Or le chevalier errant est investi d'une mission, de faire triompher le droit, défendre les opprimés, la veuve et l'orphelin, et autres causes du même acabit pour la plus grande gloire de sa belle. Errant, il se doit d'aller sur les chemins, où doivent survenir les aventures lui permettant d'accomplir pleinement sa destinée.

Notre hidalgo quitte donc son village. Son imagination galopante transforme des moulins en monstres, des auberges en châteaux, des outres de vins en autres monstres, des moines en criminels, etc. Evidemment, autour de lui, c'est l'étonnement, car hormis ces lubies, Don Quichotte tient des propos très cohérents et raisonnables... Certains fuient, d'autres jouent le jeu. Parmi ceux-ci, dans le premier tome, peu contrarient le chevalier errant, conscients que le combat serait long, ou pour préserver leur bien. Dans le second tome en revanche, toute une cour ducale encouragent Don Quichotte et Sancho Panza (son écuyer), pour le plaisir de se moquer d'eux. C'est bien plus malsain, nettement moins drôle à lire. 

 

Cervantès a de nombreuses cordes à son arc. L'humour est tour à tour gag visuel, jeu de mots, comique de situation, absurde... Il multiplie aussi les disgressions, les "nouvelles" adjointes au corps du récit sans que l'intrigue n'en dépende vraiment (c'est même assumé explicitement, parfois trop long). Don Quichotte, c'est également la coexistence des personnages principaux avec leur double: dans le second tome (et dans la réalité pour Cervantès), Don Quichotte est précédé par sa réputation dont des écrivains douteux ont fait des romans largement diffusés. L'ambivalence est partout; entre la raison et la folie des personnages, entre les personnages "réels" dans la fiction et les personnages "fictifs" dans la fiction, etc. Autre thème de l'oeuvre de Cervantès: l'amitié entre Don Quichotte et Sancho Panza, d'abord paysan frustre qui se laisse convaincre de devenir écuyer, et qui peu à peu mûrit.

 

Des dizaines de thèses ont été écrites en s'appuyant sur le roman de Cervantès, tellement il y a à dire, à analyser, à décrypter, à faire dialoguer. On peut aussi savourer le texte... Il y a de quoi.

 


 

 

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Rédigé par davveld

Publié dans #Livres

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